Souffrances ordinaires.

Les tempêtes extérieures m’indiffèrent
Je reste froid de marbre et de fer
Le visage inexpressif est trompeur
Car dedans se cache ma terreur

Simplement vaincu par la fatalité
J’ai perdu toute ma combativité
Dès lors où est l’importance
Et peu importent les circonstances

Il n’est que de se laisser porter
Tout en évitant les douleurs
Car un jour l’éternelle froideur
Viendra forcément me frapper

Brute sèche et inéluctable
Comme entrer en collision
La toute fin des illusions
Un destin tragique inévitable

Avant d’apprendre la tristesse
Avant d’apprendre la détresse
Avant de connaître les sanglots
Et que ne me fuie le repos

J’étais plein de gaité
A longueur de journée
Toujours à un projet
Et l’entrain chevillé

Comme un volcan en ébullition
Animé de tant de passion
Que cela devenait débordant
Pour mon entourage gênant

C’est à grands coups de frustrations
Que s’en furent ces jeunes années
Aujourd’hui elles sont dépassées
Il ne m’en reste que l’imagination

Il faut faire confiance au lecteur
Il trouvera forcément son bonheur
Son regard fera naître quelque beauté
Sur ces courts et simples mots jetés

Dans sa propre solitude
Il percevra nos intentions
Animé de ses passions
Partageant sa sollicitude

Chaque strophe prendra son écho
Dans chacun de nos egos
Chaque rime son interprétation
Même sujette à précaution

Et puis il y a cette petite musique
Cette particulière rythmique
L’enchaînement des syllabes
Qui nous fait sortir du banal

L’âme a la mélancolie facile
Soumis à la rime que je file
Je suis l’otage de mes sentiments
Et des mots ne suis que l’amant

Ils ne se soumettent pas à moi
Mais s’imposent lorsqu’ils surgissent
Dès lors je ne peux que survivre
Pour combien d’années ou de mois?

Me voici réduit à l’état de canal
Simple tuyau tout-à-fait banal
Suis-je même de ces vers le père
Ou bien est-ce que je persévère?

Mes poèmes répondent-ils à mon appel
Ou bien est-ce juste le contraire
Remplissent-ils autour de moi l’air
Se ramassent-ils toujours à la pelle?

Dans le creux de mes mains
Je tiens mon propre destin
Parfois je souffle sur ses cendres
En espérant le faire reprendre

Je l’entoure de mes attentions
Le préservant comme une feu sacré
Il réchauffe mais sans combustion
Faisant prendre une couleur nacrée

A mes phalanges abîmées
Qui se joignent en coupelle
Pour conserver l’étincelle
Essayer de la sublimer

Tant que j’en aurais la force
Tant qu’il restera du courage
Elle demeurera l’amorce
Et moi son unique otage

Parfois la lutte est vaine
La chaleur monte à contre courant
Même lorsque vient la haine
Quelque chose nous pousse en avant

Un attrait plus fort que tout
Comme une autre partie de nous
Qui soudainement se ressoude
Comme l’avant bras au coude

On tente de s’en détourner
Mais toujours comme la marée
Cela revient pour nous hanter
Qui donc peut stopper ces bouffées

Puis un jour, une circonstance
Mettent à bas vos résistances
Le barrage cède alors d’un coup
Sans pouvoir prendre ses jambes à son cou

Il y a ceux qui meurent
Il y a ceux qui demeurent
Il y a ceux qui succombent
Il y a ceux qui comblent

Parfois l’on cède
Parfois l’on décède
Parfois l’on concède
Parfois l’on précède

Il y a ceux qui passent
Il y a ceux qui trépassent
Il y a ceux qui dépassent
Il y a ceux qui repassent

Je suis de ceux qui respirent
Mais pense à ceux qui expirent
Tous ceux qui périssent
Aucun d’entre eux ne me hérissent

Toi mon bonheur enfui
Tu me hantes jour et nuit
Tu me sembles inaccessible
Pour tout dire impossible

Je ne t’avais pas vu venir
Mais n’ai pas su te retenir
A l’ombre du temps qui passe
Lorsque tout délasse

Ta chaude présence apaisante
Devient à ce point envoûtante
Que l’on te croit naturelle
Et l’on t’envisage éternelle

Alors que c’est le contraire
Il faut apprécier ta venue
Même quand elle éphémère
Car ton départ nous laisse nus

L’être humain ne veut plus partager
Il voudrait de tout s’accaparer
Oui tout est saccagé
Rien n’est vraiment épargné
Ni le ciel ni même la terre
Ni l’espace ni même l’air

C’est n’est pas tant qu’il soit nombreux
C’est avant tout qu’il n’est pas heureux
Il voudrait à toutes forces posséder
Tout ce qu’il ne peut pas contrôler
Dès lors il ne cesse de s’approprier
Tout ce qu’il est possible de convoiter

Y’a t’il donc un soucis avec la propriété
Doit-on purement et simplement l’oublier
Car puisqu’il est question d’économie
Faisons donc preuve de parcimonie
Épargnons tout ce qui est fragile
Faisons en sorte que cela soit possible

Lorsque se closent mes paupières
Que le calme s’empare de mes rêves
Peut-on pour autant parlé de trêve
Assailli par mes échecs d’hier
Je lutte pour trouver mes demains
A la recherche d’un bonheur mutin

Lequel s’acharne à m’échapper
Et moi de le poursuivre sans cesse
Il n’est pas sensible aux caresses
Ni aux films devant le canapé
Il n’en fait toujours qu’a sa tête
C’est ma quotidienne quête

Mais parfois au tournant d’un cauchemar
Quand tout est sombre tout est noir
Le voici qui se laisse prendre à mon jeu
Et nous sommes alors un et plus deux
Il se trouve qu’il a souvent tes yeux
M’offrant du ciel et de la mer le bleu

Si j’étais la pluie tomberais je plus doucement
Plus tendrement que je ne le fais à présent
Serais-je aussi fin et élégant qu’un crachin
Aurais-je l’audace de me reprendre dès le matin

Si j’étais la pluie mouillerais je autant
Traversant lentement les vêtements
Plus que collant je serais imbibant
Chaque couche passant et pénétrant

Sans doute serais-je une pluie chaude
A l’image de la chaleur de mon corps
Enveloppant celui des autres telle une ode
Je ne demanderais pas vraiment leur accord

Je me contenterais de me faire pleuvoir
Jusqu’à ne plus du tout en pouvoir
Me déversant ainsi jusqu’à plus soif
Car pas moyen que quiconque se rebiffe

Es-tu toujours un homme
L’es-tu encore dis-moi
Ou bien n’es-tu qu’en somme
Qu’un simple corps pour quoi?

Car toujours tu dois être fort
Quitte à être un homme mort
Et en toutes circonstances
Te comporter selon les convenances

Soumis en permanence
Au culte de la performance
Aucune faiblesse n’est permise
La complainte n’est pas de mise

Et pourtant quand on flanche
Qu’on est plus qu’une vieille branche
On se voudrait toujours vert
Sans doute pas les pieds sur terre

Dès les premières mesures mon esprit s’égare
Mes soucis prennent le chemin de l’école buissonnière
C’est un voyage sans port ni gare
Plus qu’un traitement la musique est mon infirmière

Mon pied bat seul la mesure
Mon regard se perd dans le bleu azur
Mon esprit divague en mille volutes
Mon âme y trouve de quoi reprendre la lutte

Mais dès que cessent ces doux sons
Je retombe à toutes trombes
La réalité explose comme un bombe
Je me désaccorde à l’unisson

Vite il me faut à nouveau ma dose
N’importe quoi mais quelque chose
Qui me chavire et me transporte
Loin de ma condition de cloporte

Qui donc peut supporter ma folie
Mélange brut de lumière noircie
Le temps à peine l’adoucit
Qui la veut la voici

Elle passe du moins bon au pire
Et constitue mon avenir
Ne vous fiez pas à son sourire
Dedans se cachent mes soupirs

Elle me donne autant d’énergie
Qu’elle distille sa tristesse
Je creuse encore ma faiblesse
Mettant le cap sur l’infini

Je pourrais presque la toucher
Et semble m’y accrocher
Attention si vous m’approchez
De ne pas être contaminer

Dans une grande tour vide et sans issue
Ou mon imagination était parvenue
Aucune fioriture tout est nu
Je me sens prisonnier, détenu

Je fais le tour de ma solitude
Les os transpercés de froid
Je n’attendais aucune gratitude
Et je n’a jamais eu la foi

Je retourne en mon unicité
Mais sans aucune félicité
Suivant mes frissons de peur
Trop abattu pour que je pleure

C’est si facile de glisser
De doucement baisser les bras
Je suis déjà tombé si bas
Je me sens déjà glacé

Qui voudrait vivre pour toujours
Se voir privé ainsi de l’amour
De ses amis de ses parents
De ses maîtresses ou amants

De ce qui constitue notre univers
De nos succès et nos revers
Nous sommes en fait les enfants
De notre époque de notre temps

Qui voudrait petit à petit
Se retrouver ainsi démuni
Sans le soutien des proches
Malgré les éventuelles anicroches

Se voir doucement dériver
Sans plus aucune connexion
Observant le monde avancer
Mais détaché de son évolution

A ces causes perdues
Combats sans espoir
Ces vaines vertus
Portées en étendard

A ces joies terminées
Bonheurs effacés
Souvenir vaporeux
De mes jours heureux

A mes rêves enfuis
Plus à ma portée
Et j’en suis réduis
A me supporter

A mes jours d’antan
Quand j’étais enfant
Petits moments doux
Aux contours flous

Pour ne plus souffrir
J’oublierai son nom
Pour ne plus mentir
Elle changera le sien
Ce oui qui devient non
Sera ce notre destin

Pour ne plus servir
De simple prétexte
Que cesse de sévir
Entre nous la défiance
Et que la méfiance
Sorte de ce contexte

Pour enfin sortir
De ce tête à tête
Et pouvoir s’offrir
À en perdre la tête
Un nouveau départ
Ou plongée dans le noir ?

Je suis cet appel de la forêt
Ce grand loup noir aux aguets
Au regard noir et animal
Je ne connais ni bien ni mal

Je reste le plus souvent tapis
Mais quand soudain je surgis
Ma voix même se transforme
Suis-je seulement encore un homme

Non pas qu’il me pousse des griffes
Mais je voudrais pouvoir les planter
Comme le loup me fais furtif
Pour de vous me sustenter

Je suis alors ce divin frisson
Les poils se dressant sur l’échine
C’est alors qu’à l’unisson
Triomphante se dresse ma p...

Souvent il me manque cette étincelle
Qui n’a vraiment rien d’artificiel
J’aimerais en connaître les ficelles
Pour devenir l’homme providentiel

Celui qui d’un mot rassure
Celui qui en mot assure
Revêtu de sa belle armure
D'un regard fait naître l’amour

L’éclat de ses yeux pénétrant
Sur son visage ténébreux
Comme un soleil entrant
Tout en restant mystérieux

Mais je ne suis que moi
Simple guignol de guingois
Petit bouffon pour les rois
A qui seul l’humour échoit

On ne peut pas comparer les souffrances
Chacun y est totalement légitime
Que ce soit les grandes ou les petites
Cela reste quelque chose d’intime
Il y’a d’ailleurs quelque élégance
A ne pas vouloir jauger trop vite

On ne peut séparer le corps de l’âme
Quand vous prend au fond une lame
Emportant tout ce qu’il y a de beau
N’épargnant aucun de nos souvenirs
Obérant même jusqu’à nos avenirs
Qui peut nier la force de ces maux

On ne reste égaux face à la douleur
Certains ne sentent que peu de choses
Interdisant aux autres le droit
D’en ressentir la moindre dose
Pour de plus petits malheurs
En la matière il n’y a aucune loi

Je suis ce chat sur le bas côté
Le corps tendu et rigidifié
Le fol air frais m’a frigorifié
Langue pendante jambes cassées

Une bonne âme m’a ramassé
Et dans le fossé déposé
Laissé aux éléments déchaînés
Pour que quelqu’un vienne me réclamer

Mais les semaines ont passé
Et les poils sont tombés
Ma pauvre carcasse décharnée
A juste été délaissée

Un beau jour je serai oublié
Tas d’os bien polis et entassés
Retour à la terre programmé
Aux quatre vents éparpillé

Il se sentait inutile vain et fat
Il avait beau tenter mais rien n’y fit
Il était loin de ce qu’il fut
Il avait essayer de faire ce qu’il faut

Il tentait d’atteindre son but
Mais hélas et c’était bête
Il était souvent en butte
Se sentant bête de bat

Il préférait ce qui était cuit
Mais désespérait d’être cru
Alors il poussait de grands cris
Qui hélas sonnaient tous creux

Faisant valoir son bon droit
Il évitait de jouer les durs
Cependant il se levait dru
Sachant lever parfois le doigt

J’ai traversé sa vie comme une comète
Simple éclat dans sa nuit céleste
A peine une traînée de lumière
Soleil vif, fugace et temporaire

Pour elle seule je brillais
Et de mille feux je brûlais
je m’étais même fait laquais
Pour finalement rester à quai

A Présent ma seule émotion
Ce n’est que de la déception
Mis à part ce grand trou noir
Ou ne reste aucun espoir

Le meilleur est hier
Mais aucun retour en arrière
Obligé donc d’avancer
Quand on voudrait reculer

Il y a tout ce qu’on ne dit pas
Que l’on garde par de vers soi
Ces souffrances secrètes
Nos Intimes défaites

Quand soudain elles ressurgissent
Et violemment nous agressent
Qui vraiment leur résiste ?
Quelque étrange moine bouddhiste?

En tout cas pas moi
Premier à y succomber
Plus moyen de parler
Quand j’en suis arrivé là

Mais ne soyons pas si tristes
Car pour chaque écorchure
Reste une cicatrice
Moyen de guérir nos blessures