SUDISTE puis NORDISTE - Génépy Company

Et voici le numéro 14 du journal de la

Et voici le numéro 15 du journal de la

Et voici le numéro 16 du journal de la

Et voici le numéro 17 du journal de la

Et voici le numéro 18 du journal de la

Et voici le numéro 19 du journal de la

Et voici le numéro 20 du journal de la

1/ Coup de blues

Le bleu de son nouveau pantalon lui faisait mal yeux. Il refusa de mettre une veste bleue mais consentit à remplacer son chapeau gris par un chapeau noir. On lui donna un nouveau ceinturon portant les lettres US.
C’est en ajustant son nouveau chapeau qu’il se présenta devant un miroir.
Salamander soupira puis se tourna vers M. Bridgewater, le président de la Wine & Spirit Corporation. Ce dernier débarrassa sa bouche d’un énorme cigare afin de lui permettre de sourire. Un hochement de tête accompagna cette effusion de joie.
- Vous prenez la bonne décision, Salamander !
Le chef de la Génépy Company poussa un nouveau soupir comme seule réponse.
- Croyez-moi, l’avenir est au Nord…

Salamander était arrivé au fortin De Troyes. Le nouveau fortin de Troyes. Quelle ironie ! C’est ce fortin qui avait donné tant de fil à retordre à 5 compagnies sudistes pour le détruire tant la défense des Yankees avaient été acharnée.
Le rouleau-compresseur yankee avait eu raison de l’armée confédérée et les Yankees avaient reconstruit le fortin De Troyes.
Salamander jeta un regard sur Ronald Raigane, son nouveau compagnon de combat. Il avait une allure assez fière sur son cheval. Mais valait-il quelque chose au combat ?
D’après les plans qu’on lui avait fournis, Salamander se rendit compte qu’il lui faudrait des jours avant de rejoindre un front et de devoir taper sur des uniformes gris…

2/ Festin de roi

Le moins que l’on puisse dire est que son changement de camp n’était pas passé inaperçu ! Salamander avait été accueilli par nombres de Nordistes occupant des fonctions importantes au sein de l’armée unioniste. La gêne du début finit par laisser place à une sorte de satisfaction. La flatterie de l’égo procure toujours de douces sensations allant jusqu’à un plaisir intense.
La première journée, il se sentit oppressé d’être entouré uniquement par des soldats en uniforme bleu et il dut faire de grands efforts pour ne pas sortir son sabre et le planter dans une poitrine ou dans les reins de ses nouveaux camarades.
Et chaque fois, on lui posait la même question : mais pourquoi avoir quitté le Sud et la Génépy Company ? Et à chaque fois, Salamander donnait une réponse vague qui, il s’en rendait bien compte, ne satisfaisait pas ses interlocuteurs.
Alors, il vit débarquer Charly Cœur. Accompagné de 2 hommes aux gros bras et à l’air patibulaire. Ses fidèles exécutants pour tout ce qui était salissant. Jacky et Mitchell affichaient fièrement leurs muscles et un regard plus proche du bovin que du philosophe.
Charly Cœur était affable, ferme, directif mais charmeur. Il fit signe à Jacky et Mitchell de sortir et il se mit aux fourneaux pour cuisiner Salamander. Le menu était long et les plats furent copieux. Charly Cœur prenait plaisir à chaque bouchée et le repas s’acheva par un digestif vieux de 15 ans…

3/ Coup de sang

Amozlir avait débarqué dans la tente tel un ouragan.
- Je vais les buter !
Salamander leva les yeux de ses cartes et fit signe à son second de s’asseoir. Amozlir prit la chaise et laissa son ire s’acharner sur le pauvre siège qui acheva sa vie en miettes.
- J’imagine que tu parles de tes amis…
- Non ! Ne prononce surtout pas leurs noms sinon, ça va vraiment m’énerver…
Amozlir expliqua les dernières péripéties de leurs relations et acheva son récit par un « il faut que je change d’air sinon je vais les sabrer ».
Salamander l’écouta avec gravité et fronça les sourcils lorsque son second évoqua avoir envisagé une solution. Dans la compagnie, chacun s’était rendu compte que l’organisation était le point fort d’Amozlir mais que certains détails venaient de temps en temps tout compromettre. Salamander l’observa avec attention et tenta de déterminer le degré de gravité dans la volonté de changer d’air de son interlocuteur.
Amozlir lui expliqua pris contact avec un haut gradé yankee afin de se faire une idée de ce qu’il se passait au Nord.
- Mais tu n’y penses pas ! Tu es prêt à abandonner la Génépy ?
Cette fois, c’est Salamander qui avait poussé un hurlement en bondissant littéralement de sa chaise. Il regardait son interlocuteur avec un mélange de colère et d’effroi. Amozlir baissa légèrement la tête tout en gardant le contact visuel. Un long silence s’installa et fut rompu par une toux gênée d’Amozlir. Ce dernier se mit au garde-à-vous et fit un salut militaire digne de figurer dans les annales. Puis, il quitta la tente en laissant Salamander totalement désorienté devant cet excès de forme…

4/ Passage à l’acte

Salamander hésitait toujours. Il se retourna une dernière fois et fit un signe à ses hommes, Amozlir, John Walter et Galloway. Malgré la dangerosité de la zone qui était infestée de yankees, ils avaient tenu à accompagner leur chef le plus loin possible.
Salamander sortit de son sac un morceau de drap blanc, l’accrocha à son sabre et s’avança doucement vers un groupe de soldats yankees.

Tout était perdu à Fairfax Stone. Les Yankees avaient su profiter de la désorganisation de l’armée confédérée. La Génépy Company avait tenté une dernière attaque sur le fort Midable mais les défenseurs avaient été efficaces. Salamander avait sonné la retraite.
L’heure était grave. Tous les génépymen étaient présents et chacun put décider de la suite des évènements : partir en permission pour préparer la bataille suivante ou poursuivre le combat à Fairfax Stone.
Plus de la moitié des effectifs de la Génépy partit donc en permission dont Salamander qui laissa le commandement à Amozlir.
C’est environ un mois plus tard que Salamander regagna le champ de bataille de Fairfax Stone. Et c’est là qu’il annonça sa décision de passer au Nord…

5/ Coup dans l’eau

C’est à main levée que le vote devait être fait.
Le débat avait été relativement bref. Salamander avait exposé la situation avec le plus d’objectivité possible et la question était simple : qui était prêt à recréer la Génépy Company au Nord ?
Il fallut de longues minutes à certains génépymen pour comprendre la situation et envisager toutes les conséquences.
Salamander avait réexpliqué que le financement de la Génépy Company était conditionné au bon vouloir de M. Bridgewater, le président de la Wine & Spirit Corporation. Etre financé par une entreprise privée était un grand avantage car l’équipement était fourni sans souci et surtout le génépy mais il y avait le revers de la médaille. Comme c’était le cas actuellement.
Quelques génépymen donnèrent leur accord pour passer au Nord sans le moindre regret mais la majorité hésitait.
Les discussions reprirent et chacun finit par dire oui.
Salamander n’aimait pas la tournure des évènements. Il sentait bien le manque d’adhésion au projet de la Wine & Spirit Corporation. Ses hommes lui avaient donné leur accord mais il avait toujours un doute.
Il finit par se résoudre à envoyer un mot à M. Bridgewater pour lui signifier que la Génépy Company resterait au Sud…

6/ Chaud au cœur

Stan Douglas, Durango, Trent, Pax, Rijsel, Geoff McDubh et même Martin Luther King étaient venus à sa rencontre. Salamander avait été touché par leur accueil chaleureux. Ils étaient tous véritablement sincères et faisaient tout pour que l’intégration se passent le mieux possible.
Le moral de Salamander était remonté. Ca faisait toujours plaisir d’être apprécié. On lui ouvrit toutes les portes qu’il était possible d’ouvrir pour un indépendant et chaque compagnie yankee lui avait fait les yeux doux.
C’est après l’échange avec Charly Cœur que Wyatt Jones vint le voir afin de parler avenir. La discussion tourna essentiellement sur le futurde Salamander au sein de l’Union. Sans dévoiler les dispositions déjà prises pour la bataille suivante, Wyatt Jones expliqua sommairement comment les compagnies étaient articulées et comment elles commandées. Puis il fit une longue diatribe contre les indépendants qui étaient beaucoup trop nombreux à son goût. Il s’énerva carrément en évoquant le début de campagne de Fairfax Stone où le nord avait subi de grands revers à cause de ces indépendants.
Salamander sourit légèrement se rappelant que si le Nord avait été si facilement enfoncé, c’était essentiellement dû à un manque d’organisation. Mais les Yankees s’étaient magnifiquement ressaisis et avaient inversé la tendance de fort belle manière.
- Et la Génépy ? Elle te suit ?

7/ Cascade de démissions

La nouvelle avait fait l’effet d’une bombe : l’Etat-Major Confédéré venait d’enregistrer la démission de tous ses membres à l’exception de Luke !
En pleine bataille… au moment où la campagne était sur le point d’être gagnée par le Sud… alors que les Nordistes semblaient s’orienter vers une attaque de la dernière chance…

Salamander donna un grand verre de génépy à son second qui hésitait entre fondre en larmes de dépit et tout casser de rage. Amozlir prit le verre et une troisième voie en le buvant d’une seule traite.
- Qu’ils aillent tous se faire embrocher par les Indiens ! J’ai donné sans compter pour que le Sud soit le mieux organisé, j’y ai passé des nuits, j’ai sué sang et eau et pour quel résultat ?
Amozlir avait verdi de rage… il était maintenant dans la colère froide. Son regard devint noir et il reprit
- Qu’est-ce que je leur ai fait à Eazy et Atomizator ? Tu peux me le dire ?
Salamander fit un sourire léger et posa une main sur l’épaule de son second.
- Je crains fort qu’ils ne soient jaloux… jaloux de ton investissement productif, de ton organisation, de ta vision à long terme… bref jaloux de tout ce qu’ils n’ont pas…
Une larme coula du coin de l’œil droit d’Amozlir tant les paroles de son chef lui étaient allées droit au cœur.
- Tu crois que ça finira par se tasser ? Tu vas faire quoi, toi ?
Salamander répondit en tendant sa lettre de démission de la Chancellerie sudiste…

8/ Vague à l’âme

Cette campagne de Fairfax Stone n’en finissait pas de finir. L’annonce de la défaite sudiste avait été faite depuis plus d’un mois mais les combats continuaient toujours.
Salamander reconnaissait bien là la hargne sudiste. Cette hargne l’avait abandonné. Etait-il toujours sudiste dans l’âme ?
Il examina la carte et évalua les temps de déplacement pour concilier plusieurs choses. La première était d’équiper Ronald Raigane d’un sabre lourd. Le gaillard avait la musculature pour se servir efficacement de cette arme qui faisait des dégâts monstrueux. Mais pour cela, il fallait encore quelques jours de solde. Et comme il était inconcevable de rester planté dans ce fortin tout neuf et tout vide, Salamander se dirigea vers le fortin Décis. Ce fortin que jamais il n’avait pu approcher avec la BAS en début de campagne.
Il sourit à l’idée que finalement, il allait pouvoir rentrer dedans sans qu’il ne soit inquiété. Cette guerre prenait une tournure amusante, finalement.
Bien moins amusant était l’uniforme de Ronald Raigane. Bleu de la tête aux pieds. Impeccable. Neuf mais bleu. Trop bleu. Vraiment trop bleu.
- Tu ne pourrais pas changer ta veste ou ton pantalon et prendre autre chose que du bleu ?
Le cavalier regarda son chef avec des points d’interrogation dans les yeux.
- Ben, c’est l’uniforme réglementaire. En plus, j’ai de la chance car il est tout neuf. C’est pas souvent qu’on en reçoit un tout neuf !
Salamander soupira en se disant que le chemin serait long, très long…


(Nombre total des épisodes : 22)

9/ Rouge sang

Ce sont Galloway et Mansfield Lovell qui retinrent Salamander alors qu’il était sur le point d’embrocher James Winter comme un poulet.

A son arrivée sur Fairfax Stone, Salamander avait recréé la Génépy Company en repartant de zéro à l’exception de son éternel compagnon et ami : Padre. Le début de la campagne l’avait placé près de la Bull Run qui était commandée par James Winter. L’entente avait été bonne mais le rapport léonin faisait que personne ne pouvait s’opposer aux vues tactiques et stratégiques du chef de la Bull Run. Salamander l’avait accepté et avait contribué du mieux qu’il avait pu avec la microscopique Génépy.
C’est quand la Génépy, redirigée plein est, entama le siège puis l’assaut du fortin De Troyes que James Winter se manifesta pour donner des conseils tactiques et stratégiques. Lui qui était à des miles du siège du fortin. Cela fit sourire l’ensemble des officiers sur zone mais cela finit par les agacer quand les conseils devinrent plus directifs et plus péremptoires.
Salamander fit comme tant d’autres : il ne prêta plus aucune attention à ce que disait le chef de la Bull Run et le fortin De Troyes tomba, suivi quelques semaines plus tard par le fortin Tin & Milou.
C’est au cours d’une réunion de crise pour sauver les infrastructures du sud que les dernières remarques piquantes enrobées d’acide de James Winter asséchèrent la rivière de patience de Salamander.
Galloway et Mansfield Lovell évitèrent à Salamander de se faire juger pour assassinat d'un officier sudiste…

10/ A bras ouverts

Que c’était agréable d’être désiré !
Salamander fut reçu avec un grand étonnement par le groupe de combattants yankees. Ils avaient hésité à tirer malgré le drapeau blanc et c’est fort à point qu’arriva WJ Debrouwaert pour les empêcher de faire feu.
L’officier nordiste fit signe au cavalier sudiste de s’approcher et lui demanda de décliner son identité et la raison pour laquelle il avait un drapeau blanc.
- Salamander ?! Le chef de la Génépy change de camp ?! Mais pourquoi ? Comment ? De quel droit ? Qui va rester au Sud ? Tu as des bouteilles de génépy avec toi ? Tu ne touches plus de solde ? Tu as faim ? Tu veux du chocolat ? Tu es venu nous espionner ? Tu as pris un coup sur la tête ?
La mine triste de Salamander se transforma en rire de plus en plus puissant et profond au fur et à mesure que le Yankee posait des questions de moins en moins cohérentes prouvant ainsi qu’il était dépassé par l’événement.
WJ Debrouwaert accompagna lui-même Salamander jusqu’auprès du Conseil Stratégique Nordiste dont les membres furent surpris à l’exception de Martin Luther King qui accueillit le Sudiste avec un grand sourire devant les yeux éberlués des autres officiers nordistes.
- Messieurs, je vous présente le dernier transfuge : Salamander, le chef de la Génépy Company. Et je vous prédis qu’il ne sera pas le dernier Sudiste à nous rejoindre…

11/ Pas de vague

- Vous ne pouvez pas abandonner le Sud parce qu’un certain nombre d’officiers à l’intelligence clairsemée vous ont causé du tort.
Robert Lee, le chef de l’Armée de Virginie du Nord, avait lancé sa phrase de salut d’un ton calme et bienveillant. Il avait appris les démêlés qu’avaient eus Salamander et Amozlir avec certains officiers sudistes.
Il voulait reconstruire le Sud et pour cela il avait besoin d’un camp uni, avec des compagnies menées vigoureusement. Sa récente nomination à l’Etat-Major Confédéré lui rendait cette évidence encore plus prégnante.
- Le Sud a besoin de vous. Je vous promets que le nouvel EM saura contenir toutes les ardeurs négatives et saura faire ressortir le meilleur de chacun. C’est uni que nous vaincrons !
Robert Lee conservait son bras à demi levé, index vers le ciel tandis que l’autre main tapotait légèrement l’épaule du chef de la Génépy. Ce dernier lui lança un regard un peu moins abattu mais l’étincelle peinait à se reformer.
- Robert, je dois vous avouer que j’aurais le plus grand mal à me retenir et à retenir mes hommes pour ne pas sabrer James Winter.
Robert Lee éclata de rire et lança encore quelques encouragements avant que Salamander ne prenne congé. C’est au moment où ce dernier refermait la porte qu’il lui susurra.
- Connaissez-vous un Sudiste qui ne voudrait pas empaler James Winter ?

12/ Coup de massue

Rencontrer M. Bridgewater, le président de la Wine & Spirit Corporation, n’était pas une chose courante pour Salamander. Mais ce qui l’étonna le plus était le fait que ce soit M. Bridgewater qui s’était déplacé sur le terrain pour le rencontrer alors que toutes leurs entrevues l’avaient toujours été dans le confort du grand bureau présidentiel.
Il y avait donc quelque chose de grave.
Le voiture de M. Bridgewater était presqu’aussi confortable que les fauteuils de son bureau. Salamander se laissa fondre dans le moelleux de l’assise et ne vit que quelques secondes plus tard qu’on lui proposait un cigare de fort belle taille. Il le prit et le glissa dans la poche intérieure de sa veste noire d’un geste mécanique. C’était donc plus grave qu’imaginé.
M. Bridgewater tira une grande bouffée de son cigare et le dévissa de sa bouche pour faire une annonce.
- La Wine & Spirit Corporation va déplacer son siège d’Atlanta à New-York.
Il laissa la fumée s’échapper de sa bouche en faisant des anneaux presque parfaits. Ne voyant aucune réaction du militaire, il poursuivit.
- Vous comprendrez aisément que notre société ne pourra plus financer une compagnie sudiste.
Salamander accusa le coup. Il fit rapidement le tour des avantages qu’il allait perdre et c’est en faisant un signe négatif de la tête qu’il allait prendre la parole. Mais M. Bridgewater fut plus rapide.
- Par contre, je suis prêt à financer une compagnie nordiste… surtout si c’est vous qui en prenez la tête…

13/ A mort !

C’est une série de cris rauques qui fit sortir Salamander de sa tente. Il vit alors Galloway, John Walter et Camilien Goyette essayer de maîtriser Amozlir qui était rouge de colère et extrêmement agité.
- Laissez-moi ! Je vais lui coller 6 balles dans sa petite gueule et mon sabre dans le cul ! Mais laissez-moi, bordel !
Salamander ne reconnaissait plus son second. Mais quelle mouche l’avait encore piqué ? Il fallut un bon quart d’heure pour qu’Amozlir soit enfin maitrisé et une bonne heure avant qu’il ne soit calmé. Quasiment tous les génépymen étaient présents pour à la fois voir ce qu’il se passait et maintenir Amozlir pour ne pas qu’il fasse de bêtise. Salamander avait refusé qu’on l’attachât.
- Peux-tu nous dire ce qu’il se passe et qui tu veux occire ?
Amozlir prit une grande inspiration pour essayer de rester calme et annonça entre ses dents qu’Atomizator avait essayé de se débarrasser de lui par la voie judiciaire et voici à peine une heure par une espèce d’assassin de pacotille qui avait été mis facilement en déroute.
- Je n’en peux plus ! je n’en peux plus ! Si jamais je les rencontre sur le champ de bataille, c’est eux que je vais charger !
Salamander connaissait suffisamment son second pour savoir que ce qu’il disait était une véritable annonce de ce qu’il ferait. Il savait que quand Amozlir avait décidé quelque chose, il était très difficile de le faire reculer. La seule alternative était l’infléchissement.
- Tu sais parfaitement que ce n’est pas une solution de s’acharner ainsi sur ce pauvre Atomizator…
- Pas que sur lui… il y a aussi Eazy, Lord Tricky, Luke…
- Ouais, toute la BAS, quoi !
- Non pas toute la BAS… juste les chefs ! Ils sont tellement imbus de leurs personnes qu’ils ne regardent pas au-delà de la BAS. Une vraie plaie pour le Sud !
Salamander n’insista pas et quitta la tente non sans avoir laissé Galloway et Camilien Goyette auprès d’Amozlir pour l’empêcher de mettre à exécution son envie brutale d’en finir avec la BAS.
Le mal était pire que ce que pensait Salamander. Il y avait incompatibilité d’humeur avec le chef de la Bull Run et les chefs de la BAS. Sachant que ces deux compagnies représentaient environ moitié des combattants du Sud, la situation devenait délicate.
Salamander finit par se demander si l’avenir de la Génépy était toujours au Sud...



(Nombre total des épisodes : 22)

14/ Sombre tunnel

Salamander avait fait croire à ses hommes qu’il était allé se reposer au bord de la mer en Floride afin de préparer la nouvelle campagne. Mais il n’en était rien !
Sa dernière rencontre avec M. Bridgewater l’avait fait douter. De tout. Ou presque.
La seule certitude qu’il avait était que la Wine & spirit Corporation ne financerait plus la Génépy si la compagnie restait sudiste. Pour le reste, tout était possible mais quelle serait l’avenir sans le soutien financier de M. Bridgewater ? L’Etat-Major Confédéré serait-il prêt à financer la Génépy Company alors que les deux plus puissantes compagnies sudistes la considéraient comme nulle militairement voire comme un parasite ?
Il n’était pas dit que les autres compagnies accepteraient des génépymen dont la réputation militaire n’était pas si brillante que cela.
Fallait-il rejoindre la compagnie irrégulière des Francs-Tireurs ? Mais l’entrée chez les FT n’était possible que parce qu’ils le voulaient bien. Ils étaient extrêmement méticuleux lorsqu’il s’agissait de recruter un combattant. Alors toute une compagnie, cela était inenvisageable.
La dernière solution était de devenir indépendant. Salamander, avec Padre, Galloway et Lord No Hope Jeff, l’avaient été pendant plusieurs mois lors de la guerre précédente avant de créer la Génépy.
Il avait beau tourner le problème dans tous les sens, Salamander ne voyait aucune solution satisfaisante. Ce qui l’embêtait le plus était le risque d’éclatement du groupe qui s’était formé au sein de la Génépy.
Oui, cela l’agaçait. Cela le déprimait. Cela lui piétinait méchamment l’aorte…

15/ Les voies du Seigneur

Cela faisait un long moment que le Padre était moins présent. Il avait sans doute senti le vent tourner bien avant les autres. C’est en tout cas ce que pensait Salamander pour expliquer l’étrange absence de son ami.
A moins que ce ne soit une surconsommation de génépy pendant une longue période.
- Foutre dieu ! C’est quoi ce bordel ?
C’est une tornade monacale qui s’engouffra dans la tente du chef de la Génépy. Padre postillonnait fort tant il hurlait et les virevoltes de ses bras avaient fini par dégommer tout ce qui était sur le bureau précaire de Salamander. Il acheva ses éructations en posant les deux mains, poings fermés et bras tendus sur le pauvre bureau bien en face de son ami.
- Tu veux rejoindre le Nord ?! Mais tu n’y penses pas ! Tu ne peux pas nous abandonner. Tu ne peux pas abandonner le Sud. Tu ne peux pas, tu ne peux pas !
Salamander attendit que l’homme d’église et d’alcool ait fini de postillonner pour expliquer que ce n’était qu’une possibilité qu’il ne fallait plus écarter. Et il détailla les derniers évènements au Padre qui écoutait religieusement non sans tapoter de manière virulente sur sa pétoire. James Winter, M. Bridgewater, Eazy, Atomizator, Amozlir, Lord Tricky…
Un ange passa lentement avant que le Padre ne finisse par le chasser.
- Quoi que tu décides, je te suis…

16/ Wanted Winter

John Walter inquiétait Salamander. Il le sentait de plus en plus nerveux quand un membre de la Bull Run passait à proximité. Cela s’était manifesté après la chute du fortin Traitable et, depuis, ça empirait. Il le surprit même à sortir son sabre en voyant passer James Winter au loin.
Salamander le prit alors à part et lui expliqua qu’il avait remarqué son malaise lorsqu’un membre de la Bull Run en général et leur chef en particulier était dans le coin. John Walter secoua légèrement la tête puis fit une légère grimace avant de se jeter à l’eau.
- Chef, tu penses qu’on peut sabrer James Winter ?
Salamander esquissa un sourire puis se pinça les lèvres.
- Ne me tente pas ! Mais le code militaire interdit à un Sudiste de sabrer un autre Sudiste.
John Walter laissa éclater un rire avant de se renfrogner. Il baissa un peu la tête avant de lâcher.
- Alors, je vais passer au Nord !
Le chef de la Génépy fut d’abord surpris et émit un grand rire avant de se rendre compte que John Walter ne plaisantait pas.
- Je crois qu’il faut que tu prennes des vacances. Va sabrer quelques ours avec Verdabla. Tu verras comme ça défoule bien.
John Walter ne prit même pas la peine de sourire.
- Je préfère la chasse au Winter, quitte à être en bleu…

17/ Planche de salut

La prise du fortin Tin & Milou n’y avait rien changé. Joseph Rozwadowski avait pris sa décision et rien ne pouvait le faire revenir en arrière. A la fin de Fairfax Stone, il rejoindrait le Nord accompagné de John Wick et de Tony Obez.
Salamander et Amozlir avaient tout tenté pour les retenir mais la haine qu’ils éprouvaient pour James Winter était plus forte que tout.
Le malaise que ressentait Joseph Rozwadowski était ancien, très ancien. En fait, il était apparu dès le début de la campagne de Fairfax Stone alors qu’il était à la tête de la Brigade Charon. La Génépy et la Charon accompagnaient la Bull Run vers le fortin Traitable.
Joseph Rozwadowski se sentit écrasé par la Bull Run et par son chef. Dès lors, ce malaise ne cessa d’enfler pour finir par l’étouffer complètement.
Même si la dissolution de la Brigade Charon n’avait rien à voir avec le chef de la Bull Run, Joseph Rozwadowski ressentait une profonde lassitude et le sentiment d’être inutile. Les péripéties au sein de la Génépy lui avaient redonné un peu de baume au cœur mais, justement, le cœur n’y était plus.
La mauvaise tournure que prenait la fin de la campagne acheva de le convaincre que le Sud ne réussirait jamais à gagner tant que des officiers sudistes ne penseraient qu’à leur gloire avant de penser à leur camp.
Son seul salut était le Nord…

18/ Erreur d’aiguillage

Salamander fut surpris de voir entrer Camilien Goyette dans sa tente. Pas surpris de sa présence mais surpris de son calme. Depuis son arrivée à la Génépy Company, le Canadien s’était révélé très remuant surtout après qu’il ait amené son bison domestiqué !
Et c’était bien là un problème : le bison ne se précipitait sur un homme que pour lui faire des câlins. Aucune agressivité ne se manifestait chez lui. Bref, il servait de décoration encombrante au pire et de mascotte gênante au mieux.
Camilien Goyette salua d’une faible voix et commença une phrase dans un murmure qui se perdit au fond de sa gorge.
- Euh, Camilien, il faut que tu ouvres la bouche et que tu expulses de l’air pour faire des phrases parce que là, je n’ai rien compris !
Le Canadien prit son courage à deux mains et une grande inspiration.
- Je vais quitter la Génépy parce que… je me suis trompé de camp…
Salamander avait déjà entendu des choses étonnantes voire farfelues mais cette annonce dépassait tout ce qui était imaginable. Il ne put cacher sa surprise et c’est avec des yeux exorbités qu’il demanda quelques explications.
- Ben, c’est pas de ma faute ! Je me suis endormi dans la diligence… et j’ai loupé l’arrêt.. quand j’ai rouvert les yeux, j’ai cru que c’était bon et je me suis précipité au bureau de recrutement.
- Et tu ne t’es pas inquiété de porter un uniforme gris ?
- Ben non ! Qu’est-ce que j’en sais des couleurs des uniformes ! Les deux armées sont bariolées !
- Et tu viens me l’annoncer seulement maintenant ? Après 3 mois au sein de la Génépy !
Camilien Goyette prit un air de petit garçon qui vient de se faire prendre en faisant une bêtise.
- J’osais pas le dire car j’étais sûr que toute la Génépy allait se moquer de moi…